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lundi 5 octobre 2020

Psychiatrie, le Carrefour des Impasses

 



 
Cliquer sur les images pour les agrandir

 

Nouveauté 2020

PSYCHIATRIE, LE CARREFOUR DES IMPASSES

© Isabelle AUBERT-BAUDRON

Interzone Éditions

Illustration de la couverture: Paul O’DONOVAN

Exploited Angels in Retreat ~ The Sanctum for Receiving Reports / Anges exploités en retrait ~ Le sanctuaire pour recevoir les rapports

Version imprimée: 25 € – 246 pages – dépôt légal septembre 2020

Version  électronique gratuite – 307 pages -dépôt légal mai 2020

ISBN: 979-10-94889-04-6

 

          A William Burroughs, Brion Gysin, Henri Laborit , Roger Gentis, Francis Jeanson, Jean-Louis Baudron, Bernard Aigron, Louis Picard, Jean-Pierre Verrier, Bernard Lafond, Clovis Durand, Paul O’Donovan, à mes collègues infirmiers, et à tous les acteurs de ce livre, vivants et morts.

 

mercredi 24 juin 2020

Interzone Éditions: Une méthode simple pour se débarrasser des cauchemars


Un Rêve Plein de Soucis collage © Jean-Louis Baudron

Ce texte n’est pas un écrit littéraire, il a été rédigé au départ dans un langage familier accessible à tous, que je conserve ici. Il est en ligne en PDF à https://www.interzoneeditions.net/methode_cauchemars.pdf

J’ai également décrit cette méthode d’abord en anglais, en 1997, dans le site The Western Lands du réseau Interzone: A simple method to get rid of nightmares. Dans ce contexte, des membres de  ce réseau ont effectué une recherche commune sur les rêves en rassemblant les leurs (juillet 1997- mai 2002), dans les pages Dreams 1 et Dreams 2.

Un résumé de cette méthode a également été publié en 2014, dans le livre Des systèmes de contrôle (Interzone Éditions).

Interzone Éditions passe à WordPress

 
Paul O’Donovan: « Modified corn dolly’s literary circle »
Une nouvelle version pour Interzone Éditions, réalisée avec WordPress.org, plus performant et plus maniable qu’avec les pages en html réalisées avec Open Office https://www.interzoneeditions.net/ . Les anciennes pages sont toujours en ligne mais contiennent des liens vers les nouvelles adresses.
Les documents en format pdf ont été remis en ligne tels qu’ils étaient dans l’ancienne version, et aux mêmes adresses.

Les pages du site se trouvent en haut à droite de la page d’accueil et celles des livres édités, sous la barre de recherche.

Interzone Édition est une micro maison d’édition artisanale indépendante créée en 2008,  élaborée à partir des recherches sur une économie non-aristotélicienne entreprises au départ dans le cadre du réseau Interzone.

Mais ce site ne se limite pas à l’édition de livres. Vous y trouverez également une bibliothèque gratuite contenant une large documentation en sémantique générale, des travaux de recherche, de la musique, des illustrations, des vidéos et de quoi construire en un après-midi une machine à rêver (dreamachine) pour trois francs six sous.

A partir de la page de liens vous pourrez découvrir les divers sites du réseau Interzone.

Isabelle Aubert-Baudron
 

LA SÉMANTIQUE GÉNÉRALE POUR LES NULS




 Je mets en ligne un nouveau site, LA SÉMANTIQUE GÉNÉRALE POUR LES NULS, https://www.semantiquegenerale.net/ , destiné à héberger une partie de la documentation en sémantique générale répartie depuis les années 2000 dans mes sites La sémantique générale pour tous, Interzone Éditions et le blog Pour une économie non-aristotélicienne .

En raison de sa densité, de la diversité des sujets et de ma disponibilité fluctuante dans les mises à jour, consulter plusieurs pages conduisait parfois les visiteurs d’un site à l’autre, les plongeant inopinément dans un labyrinthe spatio-temporel où se mêlaient les pages passées et présentes. Sautant d’une page de 2019 à une autre de 1998, elle-même conduisant à d’autres pages mises en ligne à des dates différentes, ils faisaient irruption dans une histoire complètement différente, mise en ligne dans un contexte différent.

D’où la nécessité d’un site mettant un peu d’ordre dans cette cacophonie, d’une présentation moins austère et plus accessible, et réalisé avec un éditeur de site d’utilisation moins laborieuse que Word ou OpenOffice et des outils plus actuels et plus performants.

Isabelle Aubert-Baudron

dimanche 25 août 2019

Nouveau catalogue d’Interzone Editions 2019


Le nouveau catalogue d’Interzone Editions, version 2019, est en ligne en pdf à http://www.interzoneeditions.net/Plaquette_Interzone_Editions.pdf avec des liens directs sur les ouvrages et les sites.

En ces lieux des livres 2019: quelques photos

Photos prises au 15 rue Porte de Mirebeau (Isabelle Aubert-Baudron):
Vincent Dutois:


Jean-Luc Michenot et Vincent Dutois:



Daniel Ramat et Sylvie Pouliquen:


La Nouvelle République: A la rencontre des livres, côté jardin


https://www.lanouvellerepublique.fr/loudun/a-la-rencontre-des-livres-cote-jardin
Publié le | Mis à jour le

Auteurs et lecteurs au jardin.
Photo:  NR
Photo prise au 15 rue Porte de Mirebeau.
Exposants de droite à gauche:
– Sylvie Pouliquen: Éditions La Mélusine devant
– Daniel Ramat
– Isabelle Aubert-Baudron (de dos): Interzone Editions
– Jean-Luc Michenot (en arrière plan): Les mots de là

samedi 13 octobre 2018

Monsieur B: les pronoms – Enquête sur "des voix dans la tête"

 

Extrait de « Psychiatrie : le Carrefour des impasses »
à paraître chez Interzone Editions
 
(La retranscription de l’enregistrement contenue dans ce chapitre a été réalisée pour la première fois en anglais, en 1982, pour William Burroughs, qui s’intéressait aux discours des schizophrènes entendant des voix dans leurs tête, et effectuait une recherche sur les voix enregistrées par Constantin Raudive et les travaux de Julian Jaynes sur l’esprit bicaméral: voir les chapitres Ça appartient aux concombres : au sujet des voix enregistrées de Raudive, Essais, tome I, 1981, et Freud et l’inconscient, Essais, tome II, 1984, Christian Bourgois Editeur.)
            Monsieur B était un homme d’une cinquantaine d’années. De taille moyenne, il était vêtu au fil des ans d’une veste chinée défraîchie à dominance beige et de pantalons de costume dépareillés. Ses cheveux gris clairsemés étaient coiffés en arrière. Il portait souvent, été comme hiver, un feutre marron.
            Il était arrivé à l’hôpital dès l’ouverture de ce dernier, flanqué de l’étiquette de schizophrène. L’asile départemental où il était interné depuis une quinzaine d’années l’avait transféré dans le cadre de la sectorisation pour qu’il soit rapproché de sa famille. Il avait en effet une femme et deux filles qui habitaient dans les environs, mais n’avaient jamais donné signe de vie depuis son arrivée.
            Les premiers temps, l’hôpital étant ouvert, il avait tenté quelques promenades à pied jusqu’à la ville, promenades qu’il agrémentait d’une halte dans un café pour y boire un verre de vin. A son retour dans le service, il se reprochait tellement son attrait pour les boissons alcoolisées, bien qu’il n’eût jamais bu au point d’être ivre, qu’il mit un terme à ses sorties.
            Depuis, il se cantonnait dans l’enceinte de l’hôpital. Les jours de beau temps, il allait prendre le soleil sur le parking. Ses activités se bornaient à la fréquentation de la cafétéria et à la rédaction de quelques rares articles destinés au journal intérieur à l’établissement dont il gardait précieusement un exemplaire de chaque numéro dans sa chambre. Il en possédait la collection complète. Il finit par interrompre cette occupation et, s’il continuait à acheter le journal, il en cessa la lecture, disant que, comme il ne lisait pas tous les articles, il redoutait la vengeance de ceux qu’il négligeait, leur attribuant une vie et une volonté propre.
            Sa propension à boire du café avait engendré entre le personnel et lui des relations basées sur le contrôle de sa consommation de cette boisson. Comme d’autres hospitalisés, il l’utilisait pour combattre les effets de ses médicaments et emplissait généralement son bol d’une quantité de café égale sinon supérieure au volume d’eau. Devant les limites qui lui étaient posées, il réagissait par de faibles protestations, puis s’en allait en marmonnant, l’air résigné, regagnant sa chambre ou le radiateur du service auquel il s’adossait, observant les allées et venues et chantonnant de temps à autres. Sa discrétion et sa docilité en avaient fait un des oubliés du service. Ses relations avec les psychiatres se bornaient à une poignée de main quotidienne.
            Il entretenait avec les autres hospitalisés des contacts la plupart du temps courtois; avec certains il évoquait son passé dans l’armée, la deuxième guerre mondiale qui l’avait entraîné en Allemagne puis en Tunisie, bien avant ses premières relations avec la psychiatrie. Il ne supportait cependant pas que d’autres outrepassent les limites qui lui étaient fixées en matière de consommation de café et n’hésitait pas à dénoncer les éventuels goulus au personnel présent, adoptant la mimique d’un enfant cafteur : « Monsieur, il y a Untel qui boit tout le pot de café dans la cuisine! »
            Monsieur B était un homme poli, déférent même. A l’égard du personnel il adoptait l’attitude du subalterne devant son supérieur hiérarchique, la tête penchée en avant, le regard rivé au sol, n’omettant jamais de terminer ses phrases par un respectueux « Monsieur » ou « Madame ».
            Des petits faits de la vie courante, qui paraîtraient insignifiants à la plupart des gens, tenaient pour lui une grande importance. Fumeur, il lui arrivait de solliciter ou de donner du feu. A chaque fois il notait scrupuleusement sur un petit carnet le nom de la personne avec qui il avait eu cet échange et lui en rendait compte régulièrement : « Vous me devez, ou, je vous dois X fois du feu. » Quand son interlocuteur s’en étonnait, il répondait en disant que le fait de donner du feu n’était pas négligeable, qu’un sou est un sou, que les bons comptes font les bons amis et qu’il ne voulait pas devoir quoi que ce soit à quiconque.
            Il passait ses journées à réfléchir et à observer. Il s’exprimait peu. Je l’entendis une fois parler de son épouse. Il n’avait jamais cessé de l’aimer et, bien que très peiné du fait  qu’elle ne lui donne pas de nouvelle, il l’en excusait,  attribuant son silence à sa maladie : « Je ne suis qu’un pauvre fou. », disait-il. Il avait recouvert les murs de sa chambre de phrases écrites au crayon de papier dédiées à sa femme : « J’aime plus que plus que des trilliards de fois Madame B. » Un jour elle demanda le divorce et l’obtint, sans avoir revu son mari.
            Monsieur B. s’était retiré du monde des vivants et les propositions qui lui étaient faites de promenades ou de sorties au cinéma se heurtaient immanquablement à un refus : « Non, madame, je ne peux pas y aller, mes pronoms ne sont pas d’accord. » Je tentai plusieurs fois d’en savoir plus, lui demandant des explications sur ces mystérieux pronoms, sans succès. Il bredouillait alors quelques phrases inaudibles et s’en allait en chantonnant, coupant court à la conversation. Aucun soignant ne savait exactement ce qu’ils représentaient pour lui, si ce n’est qu’ils semblaient jouer un rôle négatif. Un jour, alors que je lui présentais ses médicaments, il me dit : « Ce n’est pas moi qu’il faut soigner, madame, ce sont mes pronoms. » Puis il s’éloigna, l’air préoccupé.
            J’aimais bien Monsieur B.. J’appréciais sa courtoisie et m’efforçais de m’adresser à lui avec une égale politesse. Quant aux limites que ma fonction d’infirmière m’intimait de lui poser, je les lui expliquais en prenant en compte son état de santé. Bien que peu convaincu, il était content que je mette les formes et répondait en hochant la tête, l’air résigné : « Je comprends, madame, je comprends. » Quand je prenais mon travail, il quittait son radiateur pour venir me donner une poignée de main et, soulevant son chapeau de l’autre, il ne manquait pas d’accompagner son salut d’une révérence que je lui rendais. Son visage s’animait alors d’une expression de connivence amusée. Après plusieurs années, nous entretenions des relations tacites de respect mutuel et de complicité.
            De temps en temps, il venait dans le bureau le soir après le dîner alors que je compulsais ou remplissais des dossiers et que les autres personnes étaient couchées ou regardaient la télévision. Il s’asseyait et, échangeant parfois quelques mots de l’ordre du passe-temps, passait une heure en ma compagnie. Je lui proposai de profiter de cette heure creuse pour discuter un moment  avec lui comme il m’arrivait de le faire avec d’autres hospitalisés, et lui dis que je me tenais à sa disposition au cas où il désirerait m’entretenir de sujets qui lui tenaient à cœur.
            Un beau soir, il entra dans le bureau et, de son ton de rapporteur, il dit : « Madame, il y a un de mes pronoms qui ne veut pas croire que le pape est polonais. » C’était la première fois qu’il me demandait d’intervenir dans son domaine. Je décidai de jouer le jeu et, rentrant dans le rôle de l’inspecteur  recueillant la déposition du plaignant, je résolus d’enquêter sur les fameux pronoms. J’enclenchai le magnétophone que je portais avec moi de temps en temps. La conversation qui suit est la fidèle retranscription du dialogue que nous eûmes alors. C’est, à ma connaissance, la première fois que Monsieur B. accepta de livrer des explications détaillées sur ce qu’il vivait et de dresser une carte de son territoire intérieur.
* * *
 
(en raison de la longueur de la retranscription de l’enregistrement, lire la suite dans le site d’Interzone Editions)

mardi 9 octobre 2018

Interview de Michel Foucault par Nicole Brice, 31 Mai 1961, radio diffusé sur France Culture

Par Nicole Brice, 31 Mai 1961, radio diffusé sur France Culture.
Retranscription : Isabelle Baudron (1985)
Première publication:  Objectifs 5, Automne 1985.
A lire également sur l’histoire de la folie dans le site Gallica Mœurs intimes du passé…. Série 3 / docteur Cabanès
Auteur : Cabanès, Augustin (1862-1928).
 
Michel Foucault était un philosophe considéré comme un des intellectuels contemporains les plus marquants. Son œuvre, considérable, traite de la vérité, du savoir, de la morale et de la politique. Il a écrit également une « Histoire de la sexualité ». Il s’est engagé politiquement à côté de ceux que la société a marginalisés. Il s’est d’abord intéressé aux origines de la médecine, et en particulier de la psychiatrie. Son livre « Histoire de la Folie à l’Age Classique » en témoigne. Il nous en parle dans cet entretien avec Nicole Brice, qui date du 31 Mai 1961, radio diffusé sur France Culture.
(Le sens des mots soulignés est précisé dans l’explication du texte ci-dessous.)
 
« Il m’a semblé que la folie était un phénomène de civilisation aussi variable, aussi flottant que n’importe quel autre phénomène de culture, et c’est au fond en lisant des livres américains sur la manière dont certaines populations primitives réagissent au phénomène de la folie que je me suis demandé s’il ne serait pas intéressant de voir comment notre propre culture réagit à ce phénomène.
Il y a des civilisations qui l’ont célébrée, d’autres qui l’ont tenue à l’écart; il y en a d’autres qui l’ont soignée, mais ce sur quoi je voulais insister c’est précisément sur le fait que soigner le fou n’est pas la seule réaction possible au phénomène de la folie. Je crois que parmi les fous il y a des gens aussi intéressants que chez les normaux et également autant qui sont inintéressants. Il n’y a pas de culture sans folie et c’est ce problème absolument général des rapports d’une culture avec la folie que j’ai voulu étudier sur un cas précis, c’est-à-dire sur les réactions de la culture classique à ce phénomène qui paraît si opposé au rationalisme du dix-septième siècle et du dix-huitième siècle et qui est la folie.
Je crois que le dix-septième siècle représente précisément un tournant: avant le dix-septième, en tout cas jusqu’au début du dix-septième, jusqu’à l’âge baroque à peu près, le fou a une existence entièrement libre. Il était en quelque sorte à la surface de la culture et il y vivait d’une présence extraordinairement visible. Il y avait des fêtes des fous, il y avait tout un théâtre consacré à la folie, le fou lui-même avait une place dans la littérature, il y avait une iconographie de la folie, c’est Jérôme Bosch, c’est Bruegel également; bref, on peut dire que le seizième siècle et le début du dix-septième siècle ont été surplombés par le thème de la folie comme la fin du seizième et le début du quinzième l’avaient été par la hantise de la mort. A ce moment-là, la folie était un phénomène tellement institutionnel et reconnu que certains fous, et l’un d’entre eux en particulier qui s’appelait Bluet d’Arbères, ont publié leurs œuvres, ou plutôt des gens ont publié pour eux des textes tout à fait extraordinaires, absolument illisibles d’ailleurs, et qui servaient de distractions. C’étaient des poèmes, c’étaient des histoires, c’étaient des romans et au fond jusqu’à un certain point, le Don Quichotte de Cervantès peut s’inscrire dans toute cette grande tradition de la littérature de la folie ou de la littérature sur la folie.
 
             
 
Illustrations tirées de Mœurs intimes du passé…. Série 3 / docteur Cabanès
 
Et je crois que toutes les familles ont toujours été de tous temps très ennuyées d’avoir des fous. Chaque village, chaque quartier, les villes, avaient leurs fous qui étaient entretenus, qui étaient soignés, qui étaient jusqu’à un certain point honorés. Mais justement je crois que ce qui a commencé à faire changer le statut du fou, c’est à partir du moment où la famille sous sa forme bourgeoise a pris dans la société une grande importance.
 
Et c’est au dix-septième siècle, quand les normes économiques de la vie ont changé, à l’époque du mercantilisme, que le fou, personnage oisif, personnage qui dépensait de l’argent et qui ne rapportait rien, le fou est devenu terriblement encombrant. Et la sensibilité sociale à la folie a changé en fonction, me semble-t-il, de ces phénomènes économiques.
 
A notre époque, notre culture est une culture dans laquelle tout le phénomène de la folie a été confisqué par la médecine. Pour nous, un fou c’est un malade mental. Or cela n’a pas été vrai de tous temps. Le fou, au dix-septième et au dix-huitième siècles, n’était pas un malade mental, c’était avant tout un asocial. On enfermait les fous avec d’ailleurs bien d’autres asociaux dans des sortes d’asiles. C’étaient les hôpitaux généraux en France et là, on les faisait travailler. On les faisait travailler à de grandes entreprises, à des manufactures où on leur faisait fabriquer par exemple de la toile, de la corde, etc. et ils avaient un rôle réel dans la vie économique. Cela a changé, là encore, pour beaucoup de raisons; avant tout, je crois pour des raison économiques, quand on s’est aperçu que ces grandes institutions où l’on enfermait les fous avec tous les oisifs, tous les pauvres, tous les mendiants, tous les vagabonds, avec les libertins, les homosexuels, avec les prostituées, etc., quand on s’est aperçu que ces vastes institutions ne correspondaient au fond à aucune utilité véritable. On s’est aperçu qu’elles coûtaient de l’argent, qu’elles retiraient de la circulation une main d’œuvre qui était utilisable, alors à partir de ce moment-là on a supprimé toutes ces institutions, ou plutôt on en a chassé tous ceux qui n’étaient pas fous. Et maintenant les fous occupent les asiles, c’est-à-dire qu’ils sont maintenant les seuls à résider dans ces lieux d’internement qui avaient été aménagés pour bien d’autres aux dix-septième et au dix-huitième.
 
Je crois qu’actuellement il y a un phénomène très important qui se passe depuis Nietzsche, depuis Raymond Roussel, depuis Van Gogh, depuis Artaud surtout, la folie est redevenue ou commence à redevenir ce qu’elle était aux quinzième et au seizième siècles, c’est-à-dire un phénomène de civilisation extraordinairement important. Et, de même que la folie avait été au seizième siècle, début du dix-septième siècle, chargée de porter en quelque sorte la vérité, de l’exprimer dramatiquement, eh bien il semble que maintenant la folie retrouve un petit peu de cette mission, et qu’après tout, une part de la vérité contemporaine, de la vérité de la culture contemporaine, a été proférée par des gens qui étaient à la limite de la folie ou qui faisaient de la folie l’expérience la plus profonde comme Roussel, Artaud. »
 
Michel Foucault
 
Explication du texte
 
Phénomène de civilisation: ce sont les événements qui se produisent à un moment donné dans une société donnée. Par exemple, en France actuellement, on parle du vieillissement de la population comme d’un phénomène de civilisation. Cela veut dire que les gens vivent plus vieux qu’autrefois, en moyenne jusqu’à 77 ans, parce qu’ils sont mieux nourris et mieux soignés. Mais cela n’est pas vrai dans tous les pays. Dans certains pays pauvres, comme le Togo, en Afrique, les gens ont une espérance de vie de 35 ans.
Primitif: qui est d’une civilisation peu évoluée sur le plan technique.
Civilisation: Ensemble de caractères propres à une société donnée. En 1985, en France, nous vivons dans la société industrielle occidentale.
Michel Foucault s’interroge sur la façon dont on considère la folie dans notre société, notre pays. Il a lu des livres sur la façon dont d’autres peuples, d’autres sociétés, la vivent. Il pense que la folie existe dans tous les pays, mais il s’est aperçu que l’attitude des gens par rapport à la folie était différente selon les sociétés auxquelles ils appartiennent. Il a également étudié la façon dont on la considérait autrefois dans notre pays, et il s’est aperçu que cela dépendait des époques.
Culture: c’est l’ensemble des aspects intellectuels d’une civilisation: la philosophie, la littérature, les sciences et l’art.
Culture classique: elle correspond au règne de Louis XIV (le Roi Soleil), au 17ième siècle.
Rationalisme: courant de pensée influencé par Descartes (1596-1650), le père de la logique cartésienne. Les philosophes rationalistes rejettent toute autre autorité que celle de la raison, et refusent toute croyance religieuse. A la fin du 17ième siècle, le cartésianisme va détruire l’art classique et l’esprit religieux. La folie perd alors sa dimension religieuse (au moyen âge, les fous étaient les envoyés de Dieu, ou du diable à l’époque de l’inquisition) pour devenir l’opposé de la raison, la dé-raison.
Tournant: époque où les événements changent de direction.
Age baroque: se dit de la littérature française sous Henri IV (1589-1610) et Louis XIII (1610-1643) caractérisée par une grande liberté d’expression: les gens pouvaient écrire ce qu’ils voulaient sans être inquiétés.
Iconographie: étude des diverses représentations figurées d’un sujet. A cette époque, des peintres, des écrivains, travaillaient sur la folie qui était alors un phénomène important.
Jérome Bosch: peintre hollandais (1450-1516) qui a peint des sujets fantastiques ou symboliques.
Pietr Bruegel: peintre flamand (1525-1569) considéré comme l’héritier de Bosch.
Surplombé par: dominés par. A cette époque (16ième siècle et début du 17ième), les artistes réfléchissaient et travaillaient principalement sur le thème de la folie.
Hantise: peur obsédante. A la fin du 14ième et au début du 15ième, les gens étaient surtout préoccupés par l’idée de la mort, de la fin du monde. Il y avait alors beaucoup de guerres et d’épidémies de peste.
Un phénomène institutionnel: la folie était alors un phénomène reconnu officiellement par la société; les fous n’en étaient pas rejetés, ils jouaient un rôle important.
S’inscrire dans: faire partie de.
La famille sous sa forme bourgeoise: au 17ième siècle; la bourgeoisie devint la classe la plus influente alors qu’auparavant les nobles étaient plus puissants.
Mercantilisme: doctrine des économistes des 16ième et 17ième siècles tendant à procurer à l’état les moyens d’obtenir les richesse
La sensibilité sociale à la folie: la façon dont les gens ressentent la folie, leurs réactions par rapport à elle.
Asocial: qui n’est pas adapté à la vie en société.
Oisif: personne sans profession, qui ne travaille pas.
Libertins: c’étaient des gens qui, au 17ième siècle, tendaient à se libérer de l’influence des religions. Ils furent combattus par Richelieu.
Nietzsche: philosophe allemand (1844-1900). Il a remis en question les valeurs et la morale de son époque. Dans son livre le plus célèbre, « Ainsi parlait Zarathoustra », il fait parler un surhomme à l’esprit libre qui crée de nouvelles valeurs. Atteint de paralysie générale et considéré comme fou, il fut interné en 1889 puis soigné par sa famille.
Les valeurs d’une époque: ce qui est considéré comme vrai, beau, bien, par une société, à une époque donnée. Les valeurs ne sont pas toujours les mêmes, elles changent selon les sociétés et les époques.
Raymond Roussel (1877-1933): écrivain français. Il écrivit des ouvres poétiques et des pièces de théâtre. Considéré comme maniaco-dépressif. Son œuvre a été revendiquée par les Surréalistes. Mort d’une intoxication aux barbituriques.
Van Gogh: célèbre peintre et dessinateur hollandais (1853-1890). Il s’installe à Arles en 1888 où il fut interné, souffrant d’hallucinations. Il se suicida en 1890.
Antonin Artaud: écrivain français (1896-1948). Dans son œuvre poétiques, il tenta de rendre compte de son expérience d’accéder aux sources profondes de la pensée. Il souffrit de déséquilibre mental dès son enfance. Il rejoignit les Surréalistes puis se consacra au théâtre. Dans ses « Correspondances », il parle de ses hospitalisations, de ses souffrances et de ses relations avec les médecins. (« Lettres de Rodez ») et il remet en question la notion de folie. Il fut aussi un acteur de talent.
Dramatiquement: tragiquement.
Proférées: dites.
Publié dans « Objectifs 5 », Automne 1985.

samedi 22 septembre 2018

Isabelle Aubert-Baudron: Révision de « De la manipulation des symboles: les « valeurs », « évaluation » et « identité »

©Jean-Louis Baudron: Le Monolithe Intraduisible 260518
 
L’article De la manipulation des symboles: les « valeurs », « évaluation » et « identité », (2013 et 2014), a été revu, et mis en ligne en pdf dans le site d’Interzone Editions à http://www.interzoneeditions.net/Delamanipulationdessymboles.pdf
© Isabelle Aubert-Baudron.

Isabelle Aubert-Baudron: Tous bons en anglais ? Chiche !

http://www.interzoneeditions.net/grammaire_anglaise_England.pdf
Quand je suis arrivée en cours d’anglais à l’université en 1970, le professeur nous a tenu le discours suivant : « L’anglais est une langue facile comparée au français : vous devez apprendre le vocabulaire et la grammaire. Si vous appliquez la grammaire des manuels England, de Laffay et Kerst, (qui se trouvait à la fin des livres que nous avions alors en secondaire), vous pouvez passer l’agrégation. »
 
Dans les années quatre-vingt-dix, une collègue de travail me sollicita au sujet de son fils : scolarisé dans la région depuis l’année précédente, il venait d’un établissement dans lequel il avait étudié l’italien en première langue. Il était arrivé en quatrième dans un établissement où la première langue était l’anglais, et avait dû prendre le niveau d’enseignement en cours, sans posséder les bases indispensables enseignées en 6ème et en 5ème, avec deux ans de retard sur ses camarades. S’il était bon élève dans les autres matières, en revanche ses notes en anglais oscillaient autour de 4/20, et son professeur dans cette matière, qui l’avait pris en grippe, lui renvoyait l’image d’un élève nul pour tous les temps à venir et entendait utiliser ses notes pour justifier un redoublement de sa classe de troisième. Sa mère me demanda donc de lui donner un coup de main pour corriger ses exercices en cours, ce que j’acceptai.
 
Je fus d’emblée frappée par la pauvreté du matériel scolaire dont il disposait : aucun livre de référence solide concernant la grammaire ni le vocabulaire, des feuilles volantes fournies par l’établissement, mal polycopiées, parfois difficilement lisibles, avec des « textes à trous » que les élèves étaient censés remplir, des QCM avec des cases à cocher, exercices dont la compréhension nécessitait davantage de travail de réflexion sur leur sens exact et les attentes des rédacteurs de ces textes concernant les remplissages souhaités que sur la pratique écrite de la langue elle-même. Ces feuilles volantes, rangées à la hâte dans le cartable à la fin du cours, en sortaient bien souvent en fin de journée bouchonnées sous une masse de cahiers et de classeurs. Difficile de faire plus rebutant et dissuasif comme outils d’enseignement !
 
En plus de l’aide sur la correction des exercices, me souvenant des paroles de mon professeur d’université, je lui prêtai ma grammaire du lycée afin qu’il puisse disposer de l’ensemble des bases qui lui manquaient, et lui conseillai d’apprendre dix mots d’anglais par jour et de les revoir régulièrement, ce qu’il fit. Ses notes remontèrent, au grand étonnement de son professeur. Les deux dernières notes qu’il obtint à la fin de l’année furent un 15 et un 18 : dans ces conditions, ayant rattrapé le niveau de sa classe, la question d’un redoublement n’était plus d’actualité.
Je mets donc à la disposition des élèves désireux d’améliorer leur niveau d’anglais cette grammaire England. Certains termes français de grammaire ont été modifiés depuis, remplacés par d’autres, mais la langue anglaise n’a pas changé, ses règles sont restées identiques, quels que soient les termes utilisés en français pour les représenter par les responsables successifs des programmes scolaires. Même si les cartes, (les manuels scolaires), pour décrire le territoire (la langue anglaise) ont changé, le territoire est le même.
 
En ce qui concerne le vocabulaire, les élèves d’aujourd’hui disposent, en complément de leur dictionnaire, d’un outil précieux et plus rapide à consulter via internet à travers le site Reverso.
Indépendamment de l’enseignement scolaire, souvent rébarbatif en raison de son côté imposé et contraignant, trouver un correspondant dans un pays anglophone est motivant, car il permet d’utiliser l’anglais dans un contexte libre, pour partager des centres d’intérêts communs, tout en ouvrant sur les perspectives de voyages futurs. Communiquer avec eux via Skype permet de se familiariser avec l’anglais parlé. Ainsi il devient possible d’utiliser cette langue en fonction de ce à quoi elle est censée servir, pas uniquement parce que son enseignement est obligatoire et sanctionné par des notes, mais par intérêt personnel envers celle-ci, dans le but de communiquer avec des gens qui la parlent.
 
Il existe aujourd’hui une multitude d’outils et d’occasions pour utiliser l’anglais librement, que ce soit à travers l’étude de chansons écrites en anglais, les sous-titres sur YouTube, ou, plus prosaïquement, la compréhension des guides et manuels sur le maniement des blogs tels WordPress ou le matériel que nous achetons et qui n’ont pas été traduits en français.
 
Si vous avez une expérience négative de l’anglais dans le cadre de votre système scolaire, ne vous y arrêtez pas, ne la laissez pas vous parasiter. Ne vous identifiez pas aux images négatives de vous-même qu’il vous renvoie. Pensez à l’anglais en l’envisageant plus largement que dans ce contexte, à travers ce que la connaissance de cette langue pourrait vous apporter pour progresser dans un domaine qui vous intéresse. Considérez-la comme un outil qui peut vous ouvrir sur de nouveaux horizons. Ne limitez pas vos capacités et vos perspectives d’avenir aux seuls critères scolaires et à leurs limites : il y a les diplômes, mais également les compétences réelles. Saisissez-vous des outils pratiques à votre disposition qui vous permettront d’acquérir une meilleure connaissance de cette langue, utilisez-les par vous-mêmes, pour vous-même. Si vous le faites régulièrement, alors vous deviendrez bons en anglais, et vos notes s’amélioreront par voie de conséquence. Ce n’est pas une question d’argent (utilisez les outils gratuits à votre portée), simplement de volonté et de travail. Autrement dit, cela ne dépend que de vous.
 
Un truc pratique concernant l’usage de cette grammaire : elle est réalisée à partir d’un scannage, et est donc moins facile à manier qu’un document texte. Pour plus de facilité dans sa consultation, ouvrir le pdf dans deux fenêtres différentes, une sur la table des matières, une autre sur le contenu de la grammaire, ceci afin de ne pas avoir à remonter et descendre sans arrêt quand vous vous référez à la table en cherchant une règle en particulier.
Pour accéder à la grammaire 
C’est à vous! Bon courage et bonne chance !
Isabelle Aubert-Baudron

Aristote, Descartes, Korzybski, trois visions de l’homme et du monde: mise à jour.




L’article « LES DIFFERENTES ETAPES DE L’EVOLUTION DE L’OCCIDENT: ARISTOTE, DESCARTES, KORZYBSKI, TROIS VISIONS DE L’HOMME ET DU MONDE », en ligne à http://semantiquegenerale.free.fr/Articles/evol_occ.htm, vient d’être mis à jour et complété.

Une version en pdf, avec les notes en bas de page, plus facile à lire en raison de la longueur du texte, est en ligne à http://www.interzoneeditions.net/ADK.pdf
Isabelle AUBERT-BAUDRON

jeudi 20 septembre 2018

Isabelle Aubert-Baudron: Des équipes indépendantes aides-soignantes et infirmières de services à la personne : une alternative au travail en institution

https://generalsemantics4all.wordpress.com/2018/07/08/isabelle-aubert-baudron-des-equipes-independantes-aides-soignantes-et-infirmieres-de-services-a-la-personne-une-alternative-au-travail-en-institution/
 


 
Soutien hôpital Pierre Janet

 
Contenu
Nous réapproprier notre travail
Ce qui existe déjà.
– Les associations de service à la personne.
– Les HAD  (hospitalisation à domicile).
Comparaison avec des équipes indépendantes.
– Précision.
Exemple de planning.
Détail des salaires et coût pour les employeurs.
– En comptant trois clients.
– En comptant un quatrième client permettant d’arriver à 140 h par mois.
CQFD.
Comment procéder pratiquement quand on travaille en institution.
Niveau immobilier.
Conclusion.

Nous réapproprier notre travail

Nos témoignages sur nos expériences à hôpital et en maisons de retraite sont indispensables pour informer le public sur les conditions de soins et de travail déplorables vécues par les patients comme par les soignants. Ceci dit, une fois ces constats établis, étant donné que ceux qui  sont censés « avoir les bases » pour décider de notre travail peinent à nous entendre, nous ne sommes pas plus avancés. Ainsi, tant que nous attendons des responsables des décisions qui ont engendré la situation présente qu’ils continuent de les prendre à notre place, je ne vois pas bien comment les choses pourraient avancer.

Regardons maintenant les possibilités réelles dont nous disposons et de ce que nous pouvons faire à notre niveau :
Au niveau professionnel, nous pouvons, tout en gardant notre emploi, réfléchir à un changement d’orientation dépendant de nous. De telles possibilités existent, tout à fait légales, faciles à mettre en place sans frais, mais nous passons à côté par manque d’information. Ainsi nous pouvons nous investir nous-mêmes dans la prise en charge des personnes âgées, en constituant des équipes infirmières-aides-soignantes de services à domicile, dans le cadre des services à la personne, payés par les particuliers employeurs en chèques emploi service universels (CESU) : Voir https://www.cesu.urssaf.fr/info/accueil/s-informer-sur-le-cesu/tout-savoir/c-est-quoi-pour-qui.html

Ce qui existe déjà dans le domaine des services à la personne

Ci-dessous deux structures différentes pour lesquelles j’ai été orientée, la première par Pôle Emploi, la seconde par une agence intérim.

Si j’ai apprécié de travailler dans ces structures en raison de l’aspect relationnel avec les clients et la nature du travail, proche des emplois d’infirmière à domicile que j’avais eu en Belgique, en revanche j’ai été confrontée à des écueils inattendus inhérents aux structures mêmes.

–         Les associations de service à la personne

Les divers CDD que j’ai trouvés comme infirmière étant le fruit de mes recherches personnelles, ce travail pour cette association est le seul que Pôle Emploi m’ait jamais procuré, après m’avoir soutenu mordicus au cours de plusieurs entretiens successifs que je ne trouverais plus de travail comme infirmière, ce qui me paraissait peu vraisemblable et s’est révélé faux par la suite. J’apprendrai plusieurs mois plus tard, lors d’un entretien avec la conseillère de la Chambre des Métiers qui supervisait alors les comptes de mon entreprise de psychothérapie, que cette expérience en structure de service à la personne vers laquelle j’avais été orientée avait pour but de m’inciter à créer ma propre structure, ceci sans alors m’en informer ni me demander ce que j’en pensais. Etant proche de la retraite, je n’ai pas envisagé de le faire, mais je rassemble ici les informations permettant à d’autres de prendre cette direction.

Problèmes 
* Les rémunérations y sont faibles, souvent limitées au seul temps d’intervention passé chez les clients: les temps de trajet et le temps passé dans les locaux de l’association ne sont pas toujours payés. Voir les salaires pratiqués par l’ADHAP à titre indicatif à https://www.indeed.fr/cmp/Adhap-Services/salaries.

* les plannings qui sont imposés sont conçus comme si vous aviez le don d’ubiquité et que vous
pouviez vous téléporter d’un lieu à un autre en une seconde : ils font abstraction du temps de trajet, si bien que si vous finissez chez Mme Unetelle1 à 9h30, vous êtes censé commencer chez Mme Unetelle2 à la même heure, même si cette dernière habite à 3 kms ou que vous devez traverser la ville pour vous rendre chez-elle. Si bien que le client paie pour un temps de présence théorique, celui inscrit sur le planning, qui, en pratique, est automatiquement amputé du temps de trajet. Si vous consacrez à chaque personne le temps qui lui est dû, chaque temps de trajet représente un retard par rapport au planning, les clients sont mécontents car vous n’arrivez pas à la seconde prévue, et le retard accumulé sur votre propre horaire n’est pas payé.

Si vous utilisez votre véhicule, ce qui est généralement le cas pour les structures n’ayant pas de véhicule de service, vos frais d’essence vous sont remboursés à la fin du mois, calculés à partir du kilométrage effectué. Les sommes n’excédant généralement pas 200 € par mois, certaines associations les versent en argent liquide, sans justificatif. Une petite somme par salarié représentant une somme bien plus importante pour un effectif d’une cinquantaine d’employés, se pose la question de sa provenance. En l’occurrence, j’ai communiqué ces éléments à un élu, qui est tombé des nues en en prenant connaissance. Etant membre du conseil d’administration de la structure, il n’a pas du tout apprécié d’avoir été tenu à l’écart de cet aspect financier et a eu le sentiment d’avoir été piégé: le mois suivant, les frais d’essence étaient payés par chèque, et notifiés par écrit.

Pour les conditions de travail vécues de l’intérieur, voir « Les dessous de l’aide à domicile » https://www.sudouest.fr/2011/04/01/les-dessous-de-l-aide-a-domicile-359664-1980.php
Devant mon étonnement en fin de mois causé par un salaire inférieur à 500 €, l’administratif de l’association chargé de verser les paies m’informe que dans cette structure dédiée à la réinsertion, les salaires sont limités à 500 € par mois et qu’il a dû verser de l’argent à Pôle Emploi pour mon embauche ( ???????????). Je lui réponds qu’en tant qu’infirmière diplômée, je n’ai pas à être « réinsérée », ce à quoi il rétorque que je ne dépends pas de lui, mais de la société prestataire qui m’a recrutée à laquelle je dois m’adresser.

Autrement dit, si mon salaire est bien en dessous du salaire minimum, en revanche il rapporte de l’argent, pour ce que je peux en constater, à la société prestataire, à l’association et à Pôle emploi.
La société prestataire touche également une somme de 3000 € par an au titre de la réserve parlementaire, ce qui pose quand même question sur l’organisation du travail précaire dans ce pays, et sur la connaissance ou la méconnaissance de la précarité par les élus chargés de distribuer NOTRE argent à des acteurs prétendant lutter contre celle-ci, alors qu’ils sont responsables sur le terrain de sa planification, l’organisent sciemment et en bénéficient directement, avec des méthodes de gestion malhonnêtes dont elles se gardent bien d’informer ces mêmes élus.

Du côté des clients 
– il existe une grosse différence entre le prix payé par le client https://letarif.com/tarif#referencestva à la structure (association ou entreprise) et le prix payé à la personne qui effectue le service. Exemple : pour une heure d’intervention auprès d’une personne dépendante, le client paie 19 €, l’intervenant touche 9,97 €, si bien que 10 € sont absorbés par l’association. Autrement dit, la structure elle-même, association, entreprise, etc., absorbe une moitié de l’argent versé par le client.

– les intervenants changent tout le temps, le client ne peut pas émettre de préférence concernant les gens qui s’occupent de lui, et les responsables des plannings font en sorte que les salariés soient mobiles. Les relations entre eux et les clients doivent être les plus dépersonnalisées possible: le temps passé au auprès du client, « calculé au plus juste », limité au strict nécessaire, ne laisse pas de possibilité d’échange relationnel supplémentaire ni de temps de pause, si bien que, comme en institution, vous effectuez le travail à toute vitesse pour sauter dans votre véhicule et vous rendre le plus vite possible chez le client suivant. Les contraventions pour excès de vitesse sont à votre charge.

La plupart des associations emploient des gens non diplômés, n’ayant aucune qualification, et se chargent d’en former certains eux-mêmes (aides-soignantes). Elles emploient un maximum de gens qu’elles font travailler un nombre d’heures minimum, d’où des temps de travail d’environ une soixantaine d’heures par mois, payées au maximum 500 € : impossible de vivre avec un tel salaire. Les contrats sont précaires et peuvent être interrompus au bon vouloir de l’employeur. Ainsi, les associations dites « de réinsertion », imposent des conditions de travail telles qu’elles empêchent quiconque de se réinsérer décemment, les salaires étant à peine supérieurs à un RSA.

Chaque salarié reçoit un planning en début de journée, mais, en cas de changement au cours de la journée (annulation d’une intervention, ou intervention supplémentaire), il est plus prudent en fin de mois de vérifier le temps de travail réellement effectué, le planning de départ n’étant pas toujours actualisé en fin de mois.

–         Les HAD (hospitalisation à domicile)

Elles emploient infirmières et aides-soignantes.

Problèmes 
Personnellement j’ai été recrutée par une agence intérim pour un remplacement d’été, en tant qu’infirmière, mais une fois dans la place, le contrat n’était pas un contrat d’intérim, mais de salarié classique, amputé des primes de l’intérim. Devant mes questions à ce sujet, le directeur me répond : « J’ai déjà payé 2000 € pour votre embauche, je ne peux pas débourser plus. » ?????????????? (Décidément, c’est fou ce qu’employer des infirmières peut rapporter ! Une vraie manne !)
Il m’annonce ensuite au bout de quelques temps qu’il n’arrive pas à trouver d’aide-soignante, qu’il en a plus besoin que d’infirmières, et que si je veux aller au bout des trois mois de travail, je travaillerai comme aide-soignante, payée comme telle. Il comprend que je puisse refuser en raison de ma qualification, mais c’est à prendre ou à laisser. Comme j’ai besoin de travailler, que j’aime bien ce travail et que je n’ai pas envie de recommencer à chercher un autre CDD, j’accepte, mais avec une baisse de salaire bien évidemment.

Donc, par rapport aux conditions de travail apparentes du départ, je suis en réalité pénalisée financièrement par le biais de deux prétextes imprévus, autrement dit, par deux artifices permettant de verser un salaire moindre que celui attendu. Il s’agit d’un jeu truqué basé non sur un contrat digne de ce nom mais sur un marché de dupes.

Un autre problème, pour les patients chez qui l’équipe intervient, est la masse de matériel importé dès la première intervention au domicile des clients, dont la quantité et l’utilité sont parfois discutables, qui encombre l’espace des chambres, et qui coûte excessivement cher.

Au niveau des soignants comme à celui des clients, il y a un parasitisme financier de la structure, à leur détriment, en lien avec des acteurs extérieurs, et dans l’intérêt de ces derniers.

Comparaison avec des équipes indépendantes

En comparaison, des intervenants travaillant pour leur propre compte :
  • Fixent eux-mêmes leur taux horaire de rémunération (au minimum 10 € de l’heure pour un intervenant non diplômé, 13 € pour un aide-soignant, et 15 € pour un infirmier) qu’ils touchent en intégralité,
  • Tiennent compte des besoins des clients pour le temps passé chez eux et les horaires des interventions,
  • Peuvent leur offrir une bonne qualité de relation,
  • S’organisent ensemble sans dépendre de qui que ce soit,
  • N’entretiennent aucune structure ni aucun intermédiaire parasitique.
Il est possible de travailler seul, mais ceci implique de devoir intervenir tous les jours auprès de ses clients, sans prendre de vacances ni de jours de congé, d’où l’intérêt de constituer des équipes, au minimum de deux personnes.

Dans le cas d’aides-soignants et d’infirmiers désirant s’orienter dans ce secteur, ils sont déjà formés, déjà diplômés et connaissent déjà le travail à réaliser. Chacun étant payé directement par la personne chez qui il intervient, qui déclare ses interventions directement à l’URSSAF, ils n’ont pas besoin de structure centralisatrice nécessitant des locaux, ni de personnel d’encadrement, ni de secrétaire, ni de logiciel de gestion, etc., ni d’intermédiaire.

En ce qui concerne les structures, créer une association implique des formalités et contraintes dévoreuses de temps et d’énergie, et une entreprise, si elle est plus facile à créer au niveau administratif que de monter un dossier de RSA, doit, pour générer des bénéfices, payer, en plus des dépenses inhérentes à l’entreprise elle-même (matériel, fournitures, etc.) un ensemble de charges et sommes diverses et peut se révéler un gouffre financier : l’ex-taxe professionnelle censée avoir été supprimée en 2010, qui a été en fait été rebaptisée en « contribution économique territoriale », et dont le montant est resté identique, la location ou achat éventuel du local professionnel, son assurance, les frais de compte bancaire professionnel, du téléphone professionnel, de comptable ou d’association de gestion agréée si vous ne faites pas votre comptabilité vous-même, de la caisse de retraite, de l’URSSAF, etc.

En comparaison, la seule condition indispensable en travaillant avec le CESU est une équipe suffisante pour pouvoir se relayer chez les patients, constituée de gens qui ont envie de travailler les uns avec les autres dans le même état d’esprit, qui s’entendent bien, et soient capables de s’organiser correctement en fonction des besoins des patients et de leurs disponibilités.

De telles équipes, une fois constituées, pourraient travailler en coordination avec les Pôles Santé pour le maintien à domicile des gens dépendants, en lien avec les différents professionnels de santé, dont les médecins généralistes des clients.

–         Précision

Il n’est pas question ici de concurrencer les infirmières libérales en empiétant sur les soins qu’elles réalisent, qui sont prescrits par un médecin. Il s’agit de prendre en charge les différentes tâches permettant aux patients dépendants de rester chez eux, au moment où ils en ont besoin (ménage, toilette, prise du traitement, accompagnement des courses, aide au maniement d’internet, etc.).

Exemple de planning

Au niveau financier, voici deux prévisions, effectuées respectivement en fonction de 3 et 4 patients, à partir de plannings réels réalisés pour des patients réels, et calculées sur la base du site de l’URSSAF . Les estimations des coûts pour les employeurs et des salaires des employés sont réalisées en prenant en compte 3 coûts horaires différents selon différentes qualifications, à partir du salaire horaire minimum.

Client 1 : 4 interventions par jour :
  • 7 h – 7 h45
  • 12 h – 12 h 45
  • 15 h – 16 h
  • 18 h 30 – 19 h117 interventions par mois, pour 77 h 45 de travail.
  • Total 3 h / jour
Client 2 : 1 intervention par jour de 0h30 le soir : 19h15- 19h45, sauf le week-end : 5 interventions / semaine.
1 intervention le matin une seule fois, de 0 h 30
Total : 19 interventions dans le mois pour 9 h 30 de travail.
Client 3 : 3 interventions / jour :
  • 9 h 15- 9 h 45
  • 12 h 30- 13 h
  • 20 h – 20 h 30
A noter que certaines interventions auprès de personnes très lourdes et difficiles à mobiliser nécessitent d’être faites à deux, à moins que l’intervenant soit un homme fort.
Ces trois clients nécessitent 77 interventions dans le mois, pour 38 h 30 de travail.

Détail des salaires et coût pour les employeurs

–          En comptant trois clients (126 heures par mois)

Pour un salaire horaire de 10 € (ASH non qualifié), avec les congés payés inclus, rajoutés automatiquement par le site du CESU :
Salaire net à verser au salarié : 1 260,00 €
Cotisations sociales prélevées aux employeurs : (à répartir entre ceux-ci) 810,53 €
Avantage fiscal pour les employeurs : 1 035,27 €
Coût réel pour les employeurs : 1 035,26 €

Pour un salaire horaire de 13 € (Aide-soignante):
Salaire net à verser au salarié : 1 638,00 €
Cotisations sociales prélevées à l’employeur : 1 129,31 €
Avantage fiscal pour l’employeur : 1 383,66 €
Coût réel pour l’employeur : 1 383,65 €

Pour un salaire horaire de 15 € (infirmière) :
Salaire net à verser au salarié : 1 890,00 €
Cotisations sociales prélevées à l’employeur : 1 341,80 €
Avantage fiscal pour l’employeur : 1 615,90 €
Coût réel pour l’employeur : 1 615,90 €
Est-il possible à un intervenant de vivre avec ces trois clients pour 126 h de travail / mois (32 h par semaine) ? Sachant qu’il faut déduire les frais d’essence, le salaire est insuffisant pour un ASH, juste pour un AS et correct pour un infirmier.

–          En comptant un quatrième client permettant d’arriver à 140 h par mois

Pour un salaire horaire de 10 € :
Salaire net à verser au salarié : 1 400,00 €
Cotisations sociales prélevées à l’employeur : 900,61 €
Avantage fiscal pour l’employeur : 1 150,31 €
Coût réel pour l’employeur : 1 150,30 €

Pour un salaire horaire de 13 € :
Salaire net à verser au salarié : 1 820,00 €
Cotisations sociales prélevées à l’employeur : 1 254,77 €
Avantage fiscal pour l’employeur : 1 537,39 €
Coût réel pour l’employeur : 1 537,38 €

Pour un salaire horaire de 15 € :
Salaire net à verser au salarié : 2 100,00 €
Cotisations sociales prélevées à l’employeur : 1 490,88 €
Avantage fiscal pour l’employeur : 1 795,44 €
Coût réel pour l’employeur : 1 795,44 €

CQFD

Autrement dit, un salaire minimum pour 140 h de travail est supérieur à celui gagné dans une institution, et ceci indépendamment de la qualification.
4 clients permettent à une personne de vivre et de payer ses frais d’essence,
8 clients font vivre 2 intervenants,
16 en font vivre 4,
Etc.

En fonction des besoins de la population, des équipes de 4 personnes ou plus pourraient ainsi se développer dans différents quartiers.

Du côté des soignants : une meilleure qualité de travail, un salaire correct, un travail autonome.

Du côté des clients : une meilleure qualité de soins, pour un coût inférieur à celui d’une association, et bien moindre qu’une maison de retraite, une meilleure qualité de vie, la conservation de son autonomie.

Du côté de l’Etat : DE GROSSES ECONOMIES POUR LA SECURITE SOCIALE ET EN FRAIS ADMINISTRATIFS.

Comment procéder pratiquement quand on travaille en institution

  • Voir d’abord si l’idée intéresse des collègues,
  • Faire une prospection au niveau de son quartier / village / ville auprès des personnes âgées : réaliser une plaquette de présentation du projet à distribuer dans les boites à lettre avec un n° de téléphone à joindre, en proposant aux gens intéressés de se manifester et voir le résultat : si une dizaine de personnes répondent, alors c’est jouable.
  • Reste à voir pratiquement comment organiser les choses avec les clients :
Avant de commencer à travailler, faire passer une information dans le journal local, informer les généralistes, organiser une réunion d’information avec la population. (Voir les conseils en ligne à https://www.creerentreprise.fr/creer-activite-services-a-la-personne-statut/. )

Quand des gens demandent d’intervenir, fixer un premier rendez-vous avec eux pour faire connaissance, évaluer leurs besoins, et leur présenter la façon dont on peut y répondre (ménage, toilette, préparation des repas, prise de médicaments, petits soins, accompagnement pour les courses, etc.), fixer les horaires des interventions, préciser le tarif horaire, le contrat de travail, et les formalités pour le CESU.

Une courte expérience dans une association de service à la personne est utile au départ, le temps de se familiariser avec le fonctionnement et l’organisation.

Et c’est tout. Coût et investissement : 0 €.

L’organisation du travail d’une équipe de 4 est simple à réaliser, par les gens eux-mêmes : il suffit de se partager les temps d’interventions. Aucune tâche administrative : les congés payés sont rajoutés par le CESU.

Les interventions se font sur la base d’un contrat de travail , et le client déclare les interventions sur son espace personnel dans le site de l’URSSAF.

Pas besoin de logiciel de gestion : un simple ordinateur avec traitement de texte Word, Office ou Page et une imprimante permettent de faire et d’imprimer les documents nécessaires :
  • un document pour chaque client avec les temps d’intervention journaliers et le total horaire en fin de mois : une copie pour l’équipe, une pour chaque intervenant, une pour le client, une pour l’URSSAF,
  • un document pour chaque intervenant avec le nombre d’heures effectuées auprès de chaque client, et le total horaire à communiquer à l’URSSAF sur la page du CESU, dans l’espace salarié .
Une fois que les détails sont réglés et qu’une équipe est en mesure de fonctionner, celle-ci peut commencer à travailler, d’abord en gardant un temps partiel en institution pour réserver ses arrières, puis en se mettant en disponibilité quelques mois afin de pouvoir revenir le cas échéant, et enfin en démissionnant si le nombre de clients permet à l’équipe de vivre sur le long terme.

Niveau immobilier

Pour les personnes âgées dont les domiciles sont devenus inadaptés (escaliers, manque de confort, etc.) elles pourraient se regrouper pour louer ou acheter ensemble (4 ou 5) (en créant une SCI, société civile immobilière, ou indépendamment les uns des autres) une maison de plain-pied confortable et pratique, en se partageant les charges, les frais de soins à domicile, de nourriture et de la vie courante, ce qui leur reviendrait bien moins cher qu’une maison de retraite.
Le Royaume Uni a adopté cette formule depuis plusieurs années, une équipe passe tous les jours en fonction des besoins.

De cette façon, les gens ne sont jamais seuls, ils gardent la maîtrise de leur environnement et leur pouvoir de décision sur leur propre vie, peuvent choisir les gens avec lesquels ils ont envie de vivre, ainsi que les salariés qu’ils emploient, s’organisent entre eux pour les tâches de la vie quotidienne qu’ils souhaitent garder (cuisine, jardinage, sorties, etc.) et peuvent ainsi bénéficier d’une qualité de vie optimum.

Pour la partie immobilière, si des clients sont intéressés par cette formule, leur conseiller de surveiller les maisons à vendre ou à louer sur Internet (sites de notaires, Le Bon Coin, agences immobilières), et les orienter vers leur notaires pour obtenir les informations nécessaires.

Conclusion

Je ne sais pas quelles bases théoriques ont les gestionnaires institutionnels pour parvenir aux résultats désastreux qu’ils obtiennent au niveau de la qualité du travail et des soins, et par-dessus le marché pour un coût tel qu’il nécessiterait de devoir « faire des économies », mais je sais que les soignants ont les bases théoriques et pratiques indispensables pour s’occuper des patients (leurs compétences professionnelles et leur expérience) et organiser leur travail, mieux que ne le font ces « gestionnaires », pour un coût bien moindre pour les particuliers qui les emploient et en bénéficiant de meilleurs conditions de travail et de meilleurs salaires pour eux-mêmes.
 « Le pouvoir est fonction d’abord de l’indispensabilité de la fonction, pour
l’ensemble humain considéré. Tout individu ou tout groupe d’individus non
indispensables à la structure d’un ensemble n’ont pas de raison de détenir
un « pouvoir », puisque cet ensemble peut assurer sa fonction sans eux. »
 (Henri Laborit, « La Nouvelle Grille », p. 182, Robert Laffont). 
 Le gouvernement actuel, qui projette de se pencher sur le secteur des services à la personne, serait bien inspiré de prendre de la distance vis-à-vis des critères d’évaluation des modèles de gestion théoriques financés apparemment les yeux fermés depuis quelques décennies pour partir sur de nouvelles bases en laissant les acteurs de terrain gérer leur travail eux-mêmes. Il pourrait ainsi dégager des économies substantielles au niveau d’une masse administrative aussi ruineuse qu’inutile, dont les échelons, dépourvus de fonction pour l’ensemble des citoyens, se multiplient au détriment de ces derniers, et dont le seul but consiste à perpétuer leur propre existence.

Il serait également bienvenu d’exiger plus de transparence de la part des responsables publics et privés de cette masse administrative, dont la gestion occulte, qui échappe à tous les acteurs publics ainsi qu’à l’ensemble des citoyens, est dépourvue de légitimité dans le cadre des missions de services publics qu’ils sont payés pour assurer, et dont la confrontation à l’épreuve des faits démontre, depuis une trentaine d’années, qu’ils sont incapables de les remplir correctement.

Enfin, une plus grande vigilance de sa part au niveau de la gestion des ressources humaines est indispensable concernant des « modélisations » issues du secteur du développement personnel utilisées dans la formation des DRH, qui sont dépourvues de toute base scientifique et dont les dérives sectaires de certaines sont pointées par la MIVILUDES. Introduites en France sous la pression de lobbies d’outre-Atlantique, intégrées au package managérial, il s’agit en réalité d’outils de manipulation mentale, responsables d’un grand nombre de dépressions et de suicides dans la fonction publique. Elles servent à dissimuler des méthodes de gestion implicites peu reluisantes et à abuser les gens qui les achètent, parfois en toute bonne foi, autant que ceux qui les subissent. Loin de constituer une « modernisation », elles reposent sur les mécanismes de pensée de l’époque antique auxquelles elles prétendent nous faire régresser, et visent à nous asservir.

En revanche, sur la nouvelle base décrite ici, en restituant aux acteurs de terrain leur pouvoir de décision concernant leur propre sphère professionnelle, le gouvernement peut ainsi, pour un coût bien moindre que le coût actuel, diminuer le chômage, donner aux soignants dotés des compétences réelles les moyens de gagner leur vie correctement en travaillant dans des conditions satisfaisantes et dans le cadre d’une gestion saine et transparente, et aux personnes âgées dépendantes, la possibilité de continuer à vivre chez elles de façon adaptée à leurs revenus tout en conservant leur autonomie.