Chronique :
« Crève cœur » de Daniel DARC
Ancien
junkie touché par la foi, Daniel Darc (rien à voir avec Mireille, ni Jeanne,
encore qu’avec la seconde…) est revenu au premier plan en 2004 avec le très bel
album « Crève cœur ». Extirpé de l’enfer de la dépendance, l’homme
aux bras longs comme ses tatouages nous donne à entendre douze morceaux d’une
tenue exemplaire. Composé par l’ami Frédéric Lo avec un minimum de moyens,
porté par la voix mi rêveuse mi détachée de Darc, « Crève cœur »
parle effectivement de et à nos sentiments dans un clair-obscur doux amer avec
une élégance un rien désabusée. Quelques bluettes délicatement sucrées aux
allures de rengaines pour midinettes déçues par le prince charmant, « Rouge
rose », « Je me souviens, je me rappelle », « Mes
amis » côtoient des morceaux plus expérimentaux comme « Si tu vas là
bas », « Elégie 2 ». « Suis- je inutile et hors
d’usage, ou peut être un peu trop amer » se demande avec un brin de
coquetterie le désormais quinquagénaire sur la chanson éponyme. Allons donc,
« Crève cœur » se conclut sur l’extatique « Psaume 23 »,
seul titre non écrit par l’ex Taxi Girl, et adapté de la bible, « Le
seigneur est mon berger, je ne manque de rien, si je traverse les ravins de la
mort, je ne crains aucun mal… ». Quand la légèreté de la vie rencontre la
gravité de l’existence, c’est aussi Daniel Darc, un homme, un vrai, à sa façon,
hors normes. A écouter mais aussi à voir sans modération.
Jean
AZAREL
Décembre
2012
J’ai écrit
ces lignes il y a à peine deux mois pour un magazine en ligne qui n’a pas donné
suite. C’était pour toi, Daniel. Une façon de t’accompagner à distance. Sur le
mode cool. En espérant que ça passe. Raté. Crève cœur. Ce soir, je roule un peu
vite et malgré l’air froid, j’ai ouvert la vitre pour mieux respirer. Respirer
encore. France Info passe en boucle l’annonce de ta mort toutes les sept
minutes. « Retrouvé inanimé chez
lui, semble t-il suite à une absorption d’alcool
et de médicaments ». J’attends que Manœuvre se colle à la… (éponyme).
Il ne s’en sort pas trop mal le Philippe. Peut être mieux que ne l’aurait fait
un Adrien sorti de son cloître ou un Eudeline customisé. Daniel, tu n’as pas
voulu mourir à 27 ans. Tu as du penser que ce serait classe de partir à 27 x 2.
Mais tu t’es arrêté à 53. Le lendemain de l’annonce du retour marketé de ce
faiseur de Bowie. Le jour du retrait de Benoît XVI qui laisse orphelins un
milliard de gogos de par le monde. T’as fait exprès dis, ou bien le hasard t’a
harponné, ou bien tu t’en foutais royalement. Nous, on est quelques dizaines
sans doute à être vraiment tristes parce que des comme toi, il y en a plus
trop. Les bobos à l’égo bodybuildé, les préservatifés du bas ventre ne peuvent
pas comprendre. Ces gens là n’ont rien compris au rockn’roll, au vibrato de la
tripe qui grésille. Le corps abîmé des beautiful loosers, les chouettes rêves
planqués dans le perfecto, les excès de la schnouff qui bastonne le sang, les
lots de taxi girls au road book magnifique, il faut être passé par là pour
savoir. Savoir s’être abandonné. Savoir payer. Et le fric n’a rien à voir là
dedans. Inutile de se
perdre en conjectures. La claque. C’est fou comme ces derniers temps les
grandes morts prennent le pas sur les petites. Tu sais Daniel, j’ai rien à dire
de plus, rien à dire à la place d’Aurélie Filipetti (qui la boucle d’ailleurs,
même Lang est muet). Je n’ose même pas penser que pour rigoler je vais crever à
27x 3, car ce n’est pas gagné. Ce que je vais faire ? T’écouter en buvant du whisky, un de tes
concerts dans une salle merdique, mais délicieux parce que c’était toi, ton public, ton electric ladyland
à toi, tes sister ray de mes deux, nos alliances secrètes. Bon j’ai écrit ces
lignes à l’arrache, quelques internautes noctambules en mal de substitute les snifferont
peut être. Ce que je vais faire alors ? Chercher le garçon ? C’est
pas mon truc. Aller me pieuter c’est le mieux, en lisant une fois n’est pas
coutume une page de la bible, pour toi, pas plus, déjà que je vais mal dormir.
Jean Azarel
28 février
2013
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire