24/11/2011 05:39
Jérôme Pintoux revisite la littérature française et ses grands noms à travers une série d'interviews fictives. Entretien avec un auteur bien vivant.
D'emblée, il prévient : « Je ne hante pas les cimetières la nuit ». C'eût été beaucoup de promenades nocturnes pour ce professeur de lettres, puisque Jérôme Pintoux totalise à ce jour 1.346 de ces interviews d'un genre particulier. Son ouvrage paru le 3 novembre, Interviews d'outre-tombe, en compte 77, qui font parler des auteurs de l'Antiquité au XIX e siècle : Plaute, Caton, Saint-Augustin, Béroul, d'Aubigné, Marot, Corneille, La Bruyère, Rousseau, Balzac, Huysmans, Baudelaire... Ils sont nombreux à s'exprimer sous le micro de Jérôme Pintoux. Mais ces illustres ne se laissent pas tous facilement approcher : « Il y a des auteurs que je n'ai pas réussi à interviewer : par exemple Marguerite Duras, je n'y arrive pas, ça ne me parle pas. En revanche, il y a des auteurs, comme Zola, je l'ai interviewé 25 fois. »
Contre les caprices de la postérité
Parmi les motivations du journaliste aux interviews post mortem, un constat qui est le point de départ d'une réflexion sur la postérité. Jérôme Pintoux enseigne depuis 1984 au collège France-Bloch-Sérazin à Poitiers : « J'enseigne depuis 37 ans, et les gamins n'ont plus aucune notion de la chronologie. Mon but, c'est de remettre à la mode des écrivains oubliés, de relever quelques auteurs qui étaient tombés. J'en ai sûrement trahi certains, mais ce n'était pas l'intention, je me vois comme un passeur »
Les uns et les autres apparaissent et disparaissent des manuels scolaires au gré d'une postérité capricieuse. « La notion de postérité évolue très vite. Au XX e siècle, le Lagarde-et-Michard consacrait 20 à 30 pages à Péguy, Claudel ou Giraudoux. Aujourd'hui, on ne garde que Proust et Céline. Voltaire croyait qu'on se souviendrait de ses tragédies, et on ne retient que ses contes. C'est une notion très fluctuante. »
Prochaine étape, le panthéon littéraire anglo-saxon, et peut-être redonner la parole aux auteurs disparus d'une façon plus littérale encore : « J'ai longtemps cru que mes interviews étaient faites pour la scène, mais finalement, ça pourrait faire un feuilleton littéraire pour la radio, des sketchs ou saynètes. Il faudrait que je trouve des comédiens. » Appel est donc lancé aux personnes souhaitant donner leur voix à ceux qui n'en ont (presque) plus.
Jérôme Pintoux, « Interviews d'outre tombe. Confessions des classiques de Lagarde-et-Michard », édité par JBZ, 14,5 €. L'auteur sera l'invité de l'émission littéraire de France Culture « Tire ta langue », le dimanche 18 décembre à 12 h. Contact : j.pintoux@voila.fr.
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